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mardi 16 avril 2019

Rando entre Mérindol-les-Oliviers et le Gros Moure...

... en passant par le Pas de Maneyrole 


En ce printemps, déjà les senteurs sont présentes, rampant entre cades, cistes et romarins, descendant de chaque cime de pin, échauffées par les rayons de l'astre provençal. 
Un désir profond de retrouvailles avec les couleurs, les bruits, les odeurs, pousse toujours au départ pour quelques heures d'ivresse simple.
Sans hésiter, il faut s'aventurer à l'assaut de ces collines, rudes aux regards mais révélant tant de beautés cachées. 
Lorsque l'été étendra sa chaleur oppressante sur la moindre garrigue, le courage manquera et chacun ne cherchera plus que l'ombre salvatrice d'un grand arbre, le corps à l'horizontal et les orteils dressés vers l'azur. 

Tout en marchant, le regard à l'affut d'un insecte, d'une fleur ou d'un lézard, je découvre avec étonnement que mon village s'appelle désormais Mérindol-sur-Colorado. 

Pourquoi pas ? Car pour entendre autant de bruissements de lézards autour de moi il est nécessaire d'avoir une température idoine.  C'est le cas cet après-midi.
"Mais que Dieu me pardonne"🎵🎵🎵j'adore le sourire des lézards et leurs regards obliques lorsqu'ils me surveillent.



 Sur les bords du chemin, les fleurs ne manquent pas, jaunes, mauves, bleues. Un véritable concours de miss. Chacune sur son podium est la plus belle. Ici, la jalousie n'a pas lieu d'être.

























Brusquement, je me sens observée... Pas un bruit, pas un souffle, d'où vient cette impression ?
Quittant les fleurs du regard, levant la tête, j'aperçois alors des dizaines et des dizaines de petites chenilles suspendues au-dessus de moi. Chacune, accrochée à un fin fil, se balance au gré d'un vent léger. Là, j'assiste à une démonstration de contorsions, qui vers le haut, qui en  spirale, qui en soubresauts absurdes...  Semblable à une armada destructrice qui descendrait du ciel, je pense reconnaître les chenilles de la pyrale du buis. C'est l'horreur ! Qui va pouvoir les arrêter ? Seigneur ! Où sont les oiseaux qui pourraient les manger ?

Tout cela est bien triste mais que puis-je faire ?  Et je suis loin d'avoir atteint le but de ma rando, je continue donc à monter, encouragée par la puissante senteur des pins....



 ... pour finalement arriver à ma première étape, celle d'une clairière au milieu des résineux. Cet  espace, je l'adore. Impossible à expliquer mais il y règne un calme, une sérénité qui donnent envie de s'y étendre et de passer son temps à regarder le ciel en écoutant les chants d'oiseaux.







Je continue pour découvrir, après l'horreur des chenilles, l'horreur d'une récente déforestation. 

Il faudra bien qu'un jour, je me décide à comprendre que notre monde n'est pas "qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté".
Allons, consolons-nous avec l'observation des fleurs  et des paysages !



Et voici le Pas de Maneyrole et.... cette sente lointaine qui mène au Gros Moure dont je vais enfin faire la connaissance.



Au bord  de la piste forestière, voici une découverte assez amusante car, une fois encore, elle fait surgir deux questions : "Pourquoi certains hommes éprouvent-ils si souvent le besoin d'abandonner une fidèle compagne au milieu de nulle part. Quelle fut la panne qui mérita une telle punition ?"

Aïe ! mon questionnement a réveillé la colère d'un troll qui, lui, ne trouve pas ces abandons à son goût !


Plus je monte, plus l'aridité des lieux apparaît. Il faut avouer qu'ici, les déboisements n'ont épargné aucune végétation.

Malgré cela, les paysages lointains sont d'une beauté à couper le souffle et .... ce sont probablement ces déboisements qui me permettent d'en profiter au maximum.














Voici la fin de la piste. Il va y avoir un choix à faire et sans panneau directionnel cette fois. A droite, un  sentier semble partir vers Bénivay, à gauche une sente "doit" partir vers Piégon. Reste une troisième solution, un sillon qui, en oblique par rapport à la piste suivie, s'enfonce dans les hautes herbes et les broussailles en direction du sommet proche. Le choix n'a rien de cornélien, ce sillon me semble être le chemin à suivre . Sinon, ce sera marche arrière et le retour par la piste.
Ce qui ne deviendra pas nécessaire.

Mais...! me voici en grande indélicatesse vis-à-vis des propriétaires des terres que je traverse sans autorisation...

 


Les remords ne m'étouffent pas longtemps car je constate que ces plantations ne semblent plus entretenues et une partie des cerisiers sont repartis à l'état sauvage.

Que dire ici des panoramas qui s'offrent à moi à partir de ce sommet ? Un éblouissement ! Et dans la lumière du soir qui arrive tout doucement, je reste sans voix. 
A qui pourrais-je parler d'ailleurs ? En dehors d'un serpent, d'un renard, d'un sanglier ou d'un oiseau, je ne vois pas ...
   
L'écrivain Giono voyait les Baronnies comme "un chaos de vagues monstrueuses, bleu baleine" tant il est vrai que, lorsque l'on atteint un sommet, la plupart des collines environnantes donnent cette impression d'un dégradé naviguant à travers les bleus d'une palette.... Le Ventoux étant la grosse baleine !

Ma rando va-t-elle se terminer sur un dernier  chagrin ? Cette étendue calcaire que je viens de traverser fut, il y a peu, une grande cerisaie. Aujourd'hui, les derniers troncs gisent sur le bord du terrain. Trop vieux ? Devenus non rentables ? Probablement. Je me sens l'âme d'Idéfix, j'ai envie de m'asseoir dans les pierres et les herbes et de hurler à la mort.


Dans cette étendue meurtrie, d'innombrables plants de bouillons blancs ont pris racine et offrent aux regards les consolations d'un vert tendre et d'un velouté incomparable. 

Un pinson se chargera de transformer ma mélancolie en joie avant mon retour au pied des collines. Je l'en remercie bien mal en lui tirant un portrait tellement flou !
Rien n'est parfait.


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