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mercredi 25 février 2015

Souvenirs d'enfance ( 35) - Cours de dessin (2ème partie)

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   A la vue de notre désappointement, notre professeur se lança dans un petit laïus destiné à nous démontrer l'importance de la connaissance du prisme à base carrée par lequel, semblait-il, toute la maîtrise des proportions artistiques devait passer.
   Alors là, vraiment, mon merveilleux avenir de dessinatrice s'effondra. Adieu fleurs d'iris, de pommier ou de nénuphar. Qu'avions-nous espéré? L'enseignement de la nature, que cela pût nous plaire ou non, passerait d'abord par la représentation d'une minuscule pyramide en bois et … avec ombre s'il vous plaît.
   Jeune, je n'ai jamais eu un tempérament triste, je refusais de me plier à toutes les élucubrations des adultes quand je n'en percevais pas le bien-fondé. Et voilà donc qu'en fin d'exercice, mon prisme se vit pousser deux mignonnes petites chaussures, un bonnet à pompon et deux grandes oreilles à la manière des pommes de terre magiques.
  Je ne pus évidemment garder l'image de ce merveilleux prisme pour moi seule. Je soulevai doucement ma feuille et, accompagnant ce premier geste d'un coup de coude discret, j'en fis profiter ma voisine soudainement victime d'un rire qu'elle pensa inaudible.
   Inaudible ? Ma foi, non ! Ce rire alerta les voisines. Chacune jeta un coup d'œil insuffisamment discret. L'amusement gagna du terrain, passa d'un banc à l'autre et l'atmosphère joyeuse atteignit enfin le bureau de Madame Florian qui corrigeait les dessins de la classe précédente.
   Elle se leva, suivit les traces des rires sur les visages de mes compagnes et arriva près de moi. D'abord muette, elle observa mon prisme puis, d'une voix devenue plus que glaciale, me dit : «Vous demanderez à votre sœur de vous donner quelques cours de rattrapage», après quoi, elle retourna à sa place.
   Le choix de son sujet de leçon m'avait déçue au plus haut point mais je pense l'avoir déçue encore plus par mon indiscipline follette.
   En toute objectivité, il faut reconnaître que Madame Florian était d'une grande intégrité professionnelle. Malgré le tour coquin et irrévérencieux que j'avais joué en mettant notre classe en joie , tout au long de l'année, elle cota avec justesse la valeur réelle de mes travaux. Mais durant aucune leçon, elle ne relâcha plus son attention à mon égard. Cassant dans l'œuf toute velléité d'insubordination picturale, elle trouvait toujours la petite remarque piquante qui faisait mouche quand cela devenait nécessaire.
   De mon côté, la rancœur éprouvée, dès la première leçon, vis-à-vis des cubes en bois et autres volumes, obligea régulièrement ma main à quitter le droit trait pour s'égarer vers des courbes plus fleuries, plus dansantes, en un mot, plus naturelles....

à suivre

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