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A la vue de notre désappointement, notre professeur se lança dans un petit laïus destiné à nous démontrer l'importance de la connaissance du prisme à base carrée par lequel, semblait-il, toute la maîtrise des proportions artistiques devait passer.
A la vue de notre désappointement, notre professeur se lança dans un petit laïus destiné à nous démontrer l'importance de la connaissance du prisme à base carrée par lequel, semblait-il, toute la maîtrise des proportions artistiques devait passer.
Alors
là, vraiment, mon merveilleux avenir de dessinatrice s'effondra.
Adieu fleurs d'iris, de pommier ou de nénuphar. Qu'avions-nous
espéré? L'enseignement de la nature, que cela pût nous plaire ou
non, passerait d'abord par la représentation d'une minuscule
pyramide en bois et … avec ombre s'il vous plaît.
Jeune,
je n'ai jamais eu un tempérament triste, je refusais de me plier à
toutes les élucubrations des adultes quand je n'en percevais pas le
bien-fondé. Et voilà donc qu'en fin d'exercice, mon prisme se vit
pousser deux mignonnes petites chaussures, un bonnet à pompon et
deux grandes oreilles à la manière des pommes de terre magiques.
Je
ne pus évidemment garder l'image de ce merveilleux prisme pour moi
seule. Je soulevai doucement ma feuille et, accompagnant ce premier
geste d'un coup de coude discret, j'en fis profiter ma voisine
soudainement victime d'un rire qu'elle pensa inaudible.
Inaudible
? Ma foi, non ! Ce rire alerta les voisines. Chacune jeta un coup
d'œil insuffisamment discret. L'amusement gagna du terrain, passa
d'un banc à l'autre et l'atmosphère joyeuse atteignit enfin le
bureau de Madame Florian qui corrigeait les dessins de la classe
précédente.
Elle
se leva, suivit les traces des rires sur les visages de mes compagnes
et arriva près de moi. D'abord muette, elle observa mon prisme
puis, d'une voix devenue plus que glaciale, me dit : «Vous
demanderez à votre sœur de vous donner quelques cours de
rattrapage», après quoi, elle retourna à sa place.
Le
choix de son sujet de leçon m'avait déçue au plus haut point mais
je pense l'avoir déçue encore plus par mon indiscipline follette.
En
toute objectivité, il faut reconnaître que Madame Florian était
d'une grande intégrité professionnelle. Malgré le tour coquin et
irrévérencieux que j'avais joué en mettant notre classe en joie ,
tout au long de l'année, elle cota avec justesse la valeur réelle
de mes travaux. Mais durant aucune leçon, elle ne relâcha plus son
attention à mon égard. Cassant dans l'œuf toute velléité
d'insubordination picturale, elle trouvait toujours la petite
remarque piquante qui faisait mouche quand cela devenait nécessaire.
De
mon côté, la rancœur éprouvée, dès la première leçon,
vis-à-vis des cubes en bois et autres volumes, obligea régulièrement
ma main à quitter le droit trait pour s'égarer vers des courbes
plus fleuries, plus dansantes, en un mot, plus naturelles....
à suivre
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