Crédit photo : Jérôme Arvicus |
Le
bain de mer
-
Un concours de châteaux de sable ?
La question n'était pas
innocente. Ma mère et ses amies souhaitaient papoter en toute
tranquillité. Pendant que nous creuserions, occupation qui pouvait
prendre une bonne heure sinon plus, ces braves dames n'auraient aucun
soucis pour nous repérer parmi les autres familles installées sur
la plage.
Ma
sœur, Guy Leleux, Michel et Claudine Van Breuseghem et moi-même
nous étions alignés sur une ligne parallèle à la mer et avions
attendu les consignes renouvelées chaque jour par nos parents
respectifs ou par ma grand-mère.
Dès le signal donné, j'avais
empoigné ma pelle rouge et, le cerveau bouillonnant d'ardeur
juvénile, j'avais d'abord commencé par délimiter un grand cercle
sur le sable humide pour bien circonscrire les limites de mon futur
château. Ensuite, creusant, soufflant comme un phoque, pelletée
après pelletée, j'avais tenté d'élever un cône de sable qui ne
devait pencher ni trop à droite ni trop à gauche mais s'élèverait
le plus haut possible pour résister vaillamment aux prochains
assauts des vagues lors de la marée montante.
Le sable humide
s'effondrant moins, lors de nos constructions, j'allais parfois plus
près de la mer en chercher dans mon petit seau, perdant ainsi un
temps précieux sans en avoir conscience.
De temps à autre, je
jetais un rapide coup d'œil vers le travail des autres concurrents
et constatais, avec une colère enfantine, que, malgré tous mes
efforts et comme les autres jours, leurs tas de sable étaient déjà
bien plus élevés que le mien.
Michel, bien entendu, avait
déjà la construction la plus magnifique. Sportif dans l'âme et
dans le corps, il n'avait aucun mal à surpasser tous les amis par un
travail rapide et solide. Boy-scout de cœur, il laissait parfois
gagner ma sœur ou Guy en traînant un peu : brusque besoin de se
rafraîchir les mains dans la mer ou découverte d'un couteau nacré
ou d'une tourelle d'un blanc pur étaient les petits subterfuges
qu'il utilisait. En ce qui me concernait, je comptais pour du beurre
et du fromage.
La plus jeune et la plus
maigrichonne de notre équipe, je n'avais aucune chance de gagner mais
«vivre d'illusions» n'étant pas l'apanage des adultes, j'espérais
toujours remporter le concours et voir le drapeau qui serait planté
au sommet de mon travail s'effondrer le dernier. Cela n'était
encore jamais arrivé mais bon...
Minute après minute, la mer
avait grignoté la plage pour finir par venir lécher nos pieds. Les
pelles avaient redoublé d'efforts pour stabiliser les cônes de
sable par des claques sonores assénées du plat de leur métal. Les
fossés entourant chaque construction avaient été recreusés une
dernière fois et vite, sautillant du bout des pieds sur les dures
ondulations du sable humide, nous avions couru auprès des parents
pour empoigner les drapeaux et venir les planter à la pointe de nos
éphémères châteaux.
(à suivre)
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