Bienvenu ? Mais il ne suffit pas d'avoir, la veille, crié "prem ! " pour avoir assuré son titre de roi définitivement.
Les suivants arrivent déjà en farandole pour détrôner le beau mais trop orgueilleux "premier de cordée" (!!!).
Bien entendu, comme toujours lorsque les premières places sont comptées sur les doigts de la main, il y a des récriminations acerbes en fin de nuit. La nature n'en croit pas ses oreilles !
"Deuss" entendent les peupliers voisins. "Faux! deuss, c'est moi, espèce d'usurpateur !"
"Et pourquoi je suis toujours le troisième ?" siffle une voix aigre issue de sous une grosse euphorbe.
"Nous sommes là ! Nous sommes là !" susurrent de nombreux petits germes blancs surgis de la terre ces dernières heures.
"Vous, les tendrons, essayez de ne pas trop la ramener ! ok ? Quand ce sera votre heure, nous en reparlerons !"
"C'est quand, notre heure ? C'est quand ?" insistent les importuns.
"Quand vous aurez trouvé une robe" se moque le Deuss méprisant.
Les pourpiers, les pâquerettes et les bourraches se poussent du coude en ricanant sous cape. "Non mais, tu aurais cru ça de la part des ces fleurs habituellement si délicates ? Quelle pagaille !" chuchotent-ils. Et de continuer :
"Je crois que la pluie de cette nuit les a sérieusement bouleversées."
"C'est bien possible. Après autant de semaines d'attente, il y a de quoi en perdre les pédales, non ?"
"Tu veux dire en perdre ses bulbilles ?"
"Ah, ah, ah ! Oui, tu as raison."
Une abeille survole l'assemblée , sent passer le souffle de la révolution florale et file à tire d'ailes pour prévenir ses consœurs : "N'y allons pas tout de suite, attendons le lever du soleil. Sa chaleur les calmera. Inutile de se faire cracher aux antennes pour quelques gouttes de rosée et un chouïa de pollen."
Eh oui, on ne le croirait pas mais, dans la safraneraie, les fins de nuits ne se font pas toujours dans le calme et la sérénité.
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