Ce matin, je suis partie me promener dans la forêt des châtaigniers.
Je marchais depuis une heure lorsque, à mes pieds, je découvris un magnifique orchis.
"Ah ! Ah ! voilà une bien belle rencontre" dis-je à haute voix.
"En effet, tu as de la chance" me répondit une voix fluette venant de la fleur.
Surprise, un peu inquiète même, je me penchai vers le sol.
"Approche-toi plus, continua la voix, tu es encore un peu loin pour me voir !"
Je me mis à genoux et, MERVEILLE ! un petit lutin blanc et rose se tenait au milieu de l'orchis.
- Mais que fais-tu là ? lui demandai-je. Tu risques de te faire écraser, si petit sur cette fleur !
- En effet, j'ai bien cru que tu allais poser ta bottine sur mon orchis. Mais je me serais envolé à temps. Ne te tracasse pas trop. J'ai l'habitude de filer quand les sangliers arrivent pour croquer des châtaignes.
- Mais ... Que fais-tu là ? demandai-je encore.
- Oh ! Je prends le soleil. De temps à autre, cela me fait du bien, je suis tellement pâle !
Le lutin me fit un grand sourire puis il continua :
- Mon nom est Fériel. Assieds-toi, je vais appeler mes amis et, comme tu sembles aimer la nature, nous allons te présenter une danse du printemps.
Il frappa dans les mains et j'entendis le tintinnabulement de mille clochettes
Je regardai autour de moi, vis un tronc de Châtaignier couché au sol et m'y installai, impatiente d'admirer le spectacle des lutins.
Les oiseaux se mirent à chanter plus fort et créèrent une harmonieuse symphonie qui flotta entre les branches, se glissa sur l'herbe, se faufila parmi les troncs pour rebondir vers le ciel avant de ruisseler de nouveau entre les feuilles et les brindilles; les rayons du soleil me semblèrent plus chauds. Dans la vallée, un clocher sonna midi et, au même instant, un second lutin arriva en sautillant d'une pierre à l'autre.
Ensuite, tout alla très vite; de petits bonshommes d'un blanc mauve surgirent de partout. L'un dégringolait d'une branche, un gros joufflu se laissait glisser d'une feuille à l'autre, un petit maigrichon souleva la mousse du sol, se hissa et me fit un clin d' oeil avant d'aller s'aligner à côté de ses amis.
Lorsqu'ils furent en place, Fériel chanta très sérieusement :
"Un ! Deux ! Trois ! A petits pas !
Quatre ! Cinq ! Six ! Tous en chemise !
Sept ! Huit ! Neuf ! Cassez votre oeuf !"
La chanson était bizarre, d'autant plus qu'aucun lutin n'en suivait le rythme. Chacun s'était mis à se trémousser dans n'importe quel sens en riant de plus en plus fort. Finalement, épuisés par leurs gesticulations, ils s'écroulèrent tous sur la mousse avec des rires devenus inextinguibles.
Le chef vint se placer devant moi et, me saluant bien bas, me demanda :
- Comment as-tu trouvé ce spectacle ?
- Oh, c'était parfait, magnifique, superbe ! Je n'avais jamais rien vu de plus beau dans cette forêt.
Je me levai, moi aussi et lui fis ma plus belle révérence. En jeans et bottines de randonnée, cela me parut peu élégant mais le lutin sembla très satisfait.
- Reviens quand tu veux, me dit-il, j'ai bien aimé te rencontrer.
Se détournant, il frappa une fois encore dans ses mains et tous les petits bonshommes s'évaporèrent parmi les pierres comme des brumes minuscules.
Fériel partit se réinstaller sur son orchis et, fermant légèrement les yeux, laissa les rayons du soleil venir le caresser.
- Allez, tu peux continuer ta promenade, moi je ne bouge plus d'ici, me dit-il une dernière fois.
Sa voix était devenue de plus en plus faible pour se transformer en un minuscule ronflement quasi inaudible. Il s'était assoupi.
C'est sur la pointe des bottines que je repris ma route, évitant de marcher sur des branches mortes et ne posant plus les pieds sur aucune fleur.
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